lundi 17 mars 2014

  Historia de un Rio - Stori Flovensik est un texte tropical et utopique (utropique?). Marla en est l'auteure privilégiée. Dans ce texte, Nord et Sud cheminent ensemble le long d'un fleuve immense un jour d'été ou de printemps où toute autre activité serait trop dure à mettre en oeuvre. 

Nord et Sud ne sont pas dénués de sexualité, même si ils ne constituent jamais un couple ; en revanche ils sont strictement privés de genre. Ou plutôt, mieux dit, ils sont alternativement, ou simultanément : femme, homme, et les deux à la fois.

Cette marche, ce fleuve, ces deux personnages donneront naissance aux premiers drafts (drifts?), aux premières esquisses mouvantes de la ville mythique de K, qui sera la synthèse des trois derniers siècles d'urbanisme et d'histoire des réseaux qui pensent. La synthèse, autant que le linceul de la très hypothétique civilisation occidentale -son panonceau d'autostop, sa déclaration d'indépendance, son certificat de décès.




Que pasa con la electricidad.

C'est un jour où les réseaux étaient inexplicablement lents.
Pas d'eau dans les canaux non plus
Mauvaise odeur dans le siphon
Impossible de déterminer si ce sont les vacances ou une zone temporelle entre les vacances et le travail.

Ce sont deux machines à ne rien faire qui s'appellent Norte et Sur, ou A et B, la vérité importe peu.

Prennent les bicis pour ramper jusqu'aux abords du fleuve alimentant la ville immense.
Quel plaisir de ne pas être seul avec internet,
d'avoir un corps cheminant à côté du sien.
Ce sont quatre machines (deux en haut qui parlent, deux en bas qui roulent).

(On rouillais sur la rouille, la nuit et la pluie et le vent
oui, je me souviens, énormément de vent.
Temps gris et lourd, nuages énormes comme des continents inversés.
Hasta la ligne-floue del rio, je pense qu'on peut atteindre las orillas
On m'a dit que c'est l'endroit où le delta charrie le plus de vélos morts
et de machines usées
l'endroit de la vie joyeuse et des cadavres.)
Norte parle
Donde estamos ?

Es importante acordarse que los barrios ricos y los lugares de empleo son situados al norte y al este de la Capital, y que los pobres son al oeste y al sur, lejos de las orillas del gran rio y del buen aire que trae.

Arrêtés devant le fleuve, où il n'y a rien à faire ni rien à dire, puisque ce n'est que la ligne floue de la jonction agua-tierra.

Son dos perdidos près d'un fleuve
Le fleuve est immense
Tellement grand et large qu'on ne peut pas voir l'autre rive
Si il y a une autre rive, et si c'est bien un fleuve.
La corriente es tan lento hoy qu'il est impossible pour l’œil de déterminer le sens dans lequel il se déroule.
Sur jette une branche trop humide qui coule dans les limons beiges, entre les veines sablonneuses.
Norte explique en ayant un peu l'air de mentir que dans cette direction (choisie au hasard) il y a un pont très large et très long qui relie les deux rives.
Les yeux qui cherchent le pont, ou la direction du courant. Le regard qui seulement rencontre le regard de l'autre ou la lumière faible du soleil. Il y a un silence pesant qui indique que les corps récupèrent de la course.
Le paysage est vide de construction humaine.

Le nom de Tacoma proviendrait du nom amérindien du Mont Rainier, Tacobet, qui signifie «madre de las aguas ». Son surnom de Cité du Destin (City of Destiny) provient du fait que le site où a été construit la ville a été choisi par la Northern Pacific Railroad pour être el terminus oeste de la ligne de chemin de fer, a la extremidad sur de la baie du Commencement (Commencement Bay).

Pero no hay trenes.
C'est le delta impossible à traverser, l'origine brune du fleuve.
Le fleuve s'introduit dans les fondations de chaque maisons et l'eau du ciel est strictement la même que l'eau de la terre, la même mais à deux moments différents ;

Norte parle:
J'ai entendu une histoire de pont effondré.
Sur parle:
il n'y a que de l'eau ici, ce pays de malheur qui n'est aucun pays, et tous les pays en même temps se recouvre d'eau à intervalles réguliers.
Le fleuve déchaîné par les pluies d'amont emportant le pont et les autos dessus, on retrouvera plus tard les autos mais pas les passagers, dilués dans l'eau brune limoneuse.

Sur parle:
Les pluies diluviennes durèrent pendant des jours et des rues-fleuves se formèrent
Sur montre les photos de la marque qu'avait fait l'eau dans l'entrée de son immeuble, on voyait très bien les strates différentes indiquant avec une quasi-certitude la lenteur avec laquelle les eaux s'étaient retirées...
Norte fabrique l'image du plan en damier d'une ville, toutes les rues sont scintillantes d'eau.

Me hace pensar...
Norte raconte un rêve compliqué, ou plusieurs rêves qui se ressemblent. Dans un des rêve il lui faut se rendre de sa maison à son lieux de travail avec de l'eau jusqu'aux genoux. Les pieds heurtent d'invisibles batteries de voitures poussées au fond par un fort courant.
Un autre rêve raconte le voyage depuis une ville importante, la ville de sa naissance, jusqu'à une autre ville, celle de son travail, en marchant dans le lit d'une petite rivière au débit rapide... Durant tout ce voyage, il fait nuit.

Sur parle: J'ai rêvé d'une ville immense au milieu d'un désert ou d'une montagne. Les rues de la ville portaient des noms des fleuves et de rivières. Je remontais la rue Nil, croisait la rue Amazone, la rue Gange, la rue Rhône, puis la rue Tamise. Je cherchais la rue Mississippi mais ne la trouvait pas. Les rues étaient courbes, sans perspectives. Les façades des maisons étaient silencieuses. Il n'y avait pas de voiture garées de part et d'autre. Ça sentait la catastrophe.

Perder o vender las bicis.
Chute et roue voilée
Nord: les véhicules sont ce qui réchauffe le monde
Le résultat est le même
Il n'y a plus que les pieds

Norte parle : L'avion, le car, ont tout de l'extase sensuelle. Quand l'avion plonge ou décolle je sens mes intérieurs effectuer des trajets comme lors de caresse très prolongées. Voyage en avion et caresses ne sont pas les mêmes choses mais touchent les mêmes organes. C'est le transport du commun. Il bouge quelque chose, il déplace le point de gravité, il me fait chuter à l'intérieur de moi-même. Mais aujourd'hui, il n'y a ni avion ni car ni train ni voiture. La marche est un long préliminaire.

L'espace est si vide qu'il se remplit de mythes et de prophéties. Les pensées de Nord et Sud font émerger l'image des origines d'une ville sur une des rives du fleuve. Le fantôme de ville prend la forme d'une porte, d'un seuil ; una puerta, un ombral, PRAH, Praha, Prague, Praga.

«Veo una gran ciudad, cuya gloria se tocan las estrellas! Veo un lugar en medio de un bosque donde un empinado acantilado se eleva sobre el río Moldava. Hay un hombre, que es el trabajo umbral (prah) de la casa. Un castillo llamado Praga (Praha) que se construyó allí. Así como los príncipes y los duques encorvarse delante de un umbral, que se inclinará al castillo a la ciudad y en torno a ella. Será Honrado, privilegiado con gran renombre, alabanza y se le concedió por todo el mundo».

Norte sourit un peu, Sur baisse les yeux, mais tout ce qu'on peut voir ce sont des fragments de murs en brique éparpillés léchés par les vagues molles, et une luxuriante végétation.

Estan dos perdidos.
Nous discutons longtemps pour finir par bien nous connaître... Se connaître tellement bien qu'on bute sans arrêt sur des phrases déjà dites et des idées partagées ; jusqu'à ce qu'à nouveau le fleuve nous sépare, nous forçant à suivre des idées très différentes, des chemins évolutifs distincts. Je ne sais pas quand nous nous reverrons.

Espero verte de nuevo pronto. Ya te extraño.

Norte y Sur parlent : Sommes-nous les deux rails parallèles ? Condamnés à cheminer ensemble pour l'éternité sans jamais nous toucher ?

Ils s’assoient.
Ils savent l'eau particulièrement dense (profonde)
Sur parle : Si tu fixe l'eau pendant un long moment, ton corps finit par croire que c'est une surface solide... Ou plutôt il aimerait le croire, car une autre partie de ton corps sait très intimement que tes pieds ne pourraient pas glisser à la surface et que tu coulerais comme une pierre, ou, mieux dit, comme un tronc d'arbre.

En observant les variations d'intensité du courant, la tectonique accélérée de la surface de l'eau, et tous les objets raturant la peau.

Une Petite Tong à motifs de fleurs, du bois brûlé, des racines de nénuphar et des morceaux de polystyrène, des troncs coupés à la scie, à la hache, puis de plus en plus de troncs simplement arrachés par les pluies d'amont (qui ont duré longtemps, plus longtemps qu'une vie humaine) des brindilles qui s'ordonnent naturellement comme des aiguilles d'une boussole, quelques bouteilles vertes et un fragment de casquette.

Norte parle : N'est ce pas comme ça que tu as perdu ton sac, la première fois ?
N'est-ce pas que subitement il s'est vidé des indices de ta vie et s'est rempli à la place d'eau des rivières ? Dedans en le repêchant on trouve un poisson paniqué sans doute plus vieux que nous deux réunis ;
En se relevant, Sur parle : rien n'est statique, cependant rien n'est cyclique non plus.
La casquette fait des cercles très larges dans l'eau.

Te souviens tu de ce car qui ne longeait pas un fleuve mais qui ne faisait que traverser des ponts?
De ce moment où un petit fleuve improvisé avait coupé la route du car?

Norte fabrique l'image d'une ville dans laquelle il est possible de tout ignorer de La Capital.
Des trains et des bus qui effectuent de très longs trajets, mais qui s'arrêtent aussi en balnieue et qui s'arrêtent moins quand le tissu urbain se desserre et devient forêt, marécages et montagnes.
La Capitale, Cerveau de la Nation, n'existe pas. Elle n'est que l'une des potentialités de chaque ville, chaque village et chaque maison isolée du pays et peut-être du monde.
Ce qu'il nous faut c'est une capitale qui ne soit pas le centre de la nation. Ce qui nous faut c'est des millions de capitales et pas de nations.
Un grand pays rendu aux mouches nocturnes.
L'après-midi dans les forêts métalliques entre les montagnes de fer (mica, roches étranges à travers lesquelles la lumière passe) l'activité réduite des humains laisse imaginer que la civilisation a disparu; seules restent les mouches.

Tu sais, les kilomètres ne sont rien. Et en même temps, les kilomètres sont invincibles. Toi tu es vincible, mais ce n'est pas grave, il y a le vent et les montagnes, il y a le vent dans les montagnes. Il y a le vent dans les câbles électriques, il y a le vent et les câbles électriques.

Quand nous marchons nos corps sont entiers dans la marche, dans la mécanique de la vitesse intime... Des pierres... La poussière reste très près des pas. Dans les véhicules l'eau et la poussière s'élève et nos corps se soulèvent – (Sur) se surélèvent – Oui.

La nuit tombe. Le Rio n'a toujours qu'un courant faible. La route est poussiéreuse.

Un groupe apparaît sur la route joints ils en occupent toute la largeur.
Norte: Ils marchent pour faire la route!
Puis ils disparaîssent.
Sur: Le chemin les a avalés!

Norte sait que le chemin se fera avec Sur, et de fait s'inquiète pour son dos, son ventre, ses pieds;
Norte & Sur dorment à l'hôtel;
Odeur d'une chambre où beaucoup ont dormi et dorment encore, mais il fait trop sombre pour voir qui que ce soit même si la présence de nombreux corps au repos est palpable.
Dans l'immense construction en construction
Nous sommes rêvants.


vendredi 31 janvier 2014

Noir (2)

Noir parle. Il parle du fond d'époques lointaines mais ça pourrait être autant il y a mille ans qu'il y a quelques jours. Noir tente d'écrire un livre. 


J'ai changé complètement le fonctionnement de l'oracle du thé. Il faut un sachet de thé vert, du sucre et des feuilles de menthe. Inutile de préciser qu'il faut aussi de l'eau très chaude, en quantité acceptable. Toutes les quantités sont au choix de celui qui consulte.
On boit tout. À chaque fois que tout est bu, on attends une minute et on remet de l'eau. Observer le mouvement des feuilles de menthe et du sachet de thé, boire et remettre de l'eau, jusqu'à disparition de tout goût remplacé par la chaleur fade de l'eau. Quel est le goût qui disparaît en dernier?Celui du sucre, celui du thé ou celui de la menthe ?
Il convient d'être attentif à ses sensations gustatives. Auparavant on avait choisi un des trois ingrédients et fait correspondre une direction : droite, gauche ou droit devant. Le dernier goût à rester en bouche indique la direction à suivre choisie par le consultant avant le début de la prise de thé. On peut remplacer les mots « gauche, droite et droit devant » par oui, non et peut-être ; jour, nuit et crépuscule, homme, femme ou les deux, ou tout autre système.

Mais l'oracle peut être interprété de plusieurs autres manières. La première est la suivante : le sucre disparaît complètement en laissant un goût, les autres ingrédients subissent une transformation mais gardent leur forme ; ainsi au monde il y a des choses qui disparaissent plus vite que d'autres. Que le monde est fait d'éléments distincts qui ont des propriétés différentes selon les milieux où ils se trouvent. Et que les éléments du monde ont à la fois une forme et un goût, une substance et une potentialité.

Une autre théorie dit que contrairement à l'oracle traditionnel, qui veut qu'on assèche la tasse pour lire dans les feuilles dispersées, dans cet oracle on remet toujours de l'eau. Cet oracle montre que rien ne s'assèche vraiment et que la question importante est de connaître la durée de vie des choses.

J'utilise l'oracle pour prendre une décision. Mais quand je sais que j'ai besoin de retourner en arrière, je bois du café, qui est noir comme la nuit.


Mon dernier conseil est le suivant : ne pas utiliser trop souvent l'oracle du thé.  



jeudi 12 décembre 2013

entretiens avec Marla Zemanova (1)

-Parle moi des villes. Je sais que tu as toujours vécu dans les villes. Tu connais très bien le code des villes..
-Il y a les rues. Une ville n'a souvent que trois types de noms de rues, et hélas les exceptions sont trop rares : les saints, les guerriers et les nations. Ces trois mots peuvent être trois catégories. Moins il y a d'exceptions à ces trois catégories, plus le pays ou la ville est nationaliste.
Il y a aussi les dates, c'est vrai, qui pourraient constituer une quatrième catégorie...
-Dis m'en plus sur ce mot, Nation.
-Quand je dis une Nation, c'est une abstraction décrivant un espace clos sur lui-même et composé de symboles forts et reconnaissables qui permettent de les différencier d'avec les autres Nations. Une Nation est une machine de guerre sans réalité. Une nation est la chose qui se rapproche le plus d'une collection de règles de conduites.Tous ces symboles constituent « l'identité de nation ».
Mais, une nation restera, malgré la dureté et la précision de ses symboles, quelque chose de très abstrait et de très impalpable. Une nation, c'est l'idée d'un nuage de fer.

(Sur ce, elle matérialise un drapeau représentant un nuage cartoonesque- le drapeau est fait de tôle relativement épaisse, coupée maladroitement au chalumeau. La forme du nuage est évidée au centre. L'objet a quelque chose de comique).

Elle rit.

-Voilà, ça c'est le drapeau d'un pays et l'idée de nation en même temps. Héhé !




lundi 9 décembre 2013

Extraits de savon

Texte écrit sur un canapé, il m'a fallu un bus et un café pour me décider à le publier, malgré le fait que je ne sache pas à quel projet le relier. Quelle importance en fait?


Je
les ténèbres sur la ville ondulante comme une couverture. La lumière.
Je ne suis pas chez moi et je ne le serais jamais.
Une forme ovale luminescente, c'est un savon. Tous les savons ont une odeur spécifique, différente d'un savon l'autre. Tout savon est une planète personnelle, appelée à disparaître en laissant derrière elle une odeur, une texture elle aussi appelée à disparaître. Le savon est une lune dans le porte savon, un astre aplati aux deux bouts, est une lune humide et collante.
Un univers de savons. Spécialiste des savons. Wow, tu me connais bien... Tu m'as reconnu à l'odeur de mon hygiène. Et je l'aime, j'aime l'odeur de ton hygiène. Ta propreté n'est ensuite qu'un continent sur ta planète personnelle. Certains me disent que parfois, ils croisent des gens qui n'ont strictement pas d'hygiène, mais je ne les crois pas. Tout le monde a de l'hygiène, mais certains utilisent du savon, d'autres, de la salive et sèchent au soleil. Je suis reconnaissant de t'avoir entendu dire, une fois que seul moi t'écoutais (les autres s'écoutaient ensemble) que toute hygiène et que tout confort s'apparentait au fait d'apprendre à bien parler.
Et ta salive est en moi un des savon les plus doux.
Les odeurs sont des points sur le continent. Les odeurs sont des briques dans le mur couché de la croûte terrestre et des strates la composant.
La cave, la cave à deux niveaux, le niveau le plus bas encombré d'éboulis et inondée la moitié de l'année. 
Le grand bazar de la vie... La nuit qui se prolonge et colore le jour. Les cafés qui ne fermeront plus jamais. Les arbres qui poussent dans le toit et dans les cafés. Les arbres qui ne sont pas plus des évidences que les voitures, les gens et les immeubles. Toutes les plantes comestibles et les millions de végétaux toxiques... Les pavés soulevés, les chaises renversée, l'infinie variété des véhicules et des trains d'émotions dans une ville infinie bâtie entre avant et après, ville qui d'ailleurs n'est pas plus une évidence que les arbres, les gens etc. Le pantalon déchiré, la roue rompue. 





jeudi 28 novembre 2013

Agressif

Parfois j'écris des scénarios pour des courtes vidéos absurdes. Celui-là est assez violent. C'est une sorte de Cain et Abel où Cain n'a aucun motif pour faire mal à Abel, et où Tim est venu pour aider Cain à molester Abel.
Je cherche un financement et de l'aide pour aller m'amuser avec une caméra! Une cinquantaine d'euros pour la confection des costumes, une soixantaine d'euros pour payer un bon restaurant à ceux qui feront les personnages, une vingtaine d'euros et un conducteur dans une voiture pour m'emmener là où je veux filmer, dépendamment de la distance, et aussi une dizaine d'euros pour acheter des DVDS. Ce projet est aussi cheap qu'il en a l'air.
Ne vous pressez pas pour me faire part de votre désir fou de faire la star dans un de mes immondes costumes: je ne sais encore ni quand, ni où, ni dans une certaine mesure pourquoi.

Paysage. Sans doute l'hiver, mais rien ne le dit clairement, car il n'y a pas d'arbre. L'herbe est bien trop verte, il y a un peu de vent et du ciel gris. Est-ce un pré, un terrain vague ? Dans l'idéal, la caméra pourrait regarder d'un point de vue légèrement surélevé, elle est posée sur pied. Un fossé au premier plan offre une vague perspective molle.
Arrive un personnage. En voici deux autres, habillés de manière un peu similaire (demi-saison post-apocalyptique). Peut-on mieux en déduire l'époque de l'année ? Sûrement pas, et ça n'a pas de réelle importance. On devrait savoir qu'il fait suffisamment froid pour qu'il soit nécessaire de se couvrir. Le premier porte un genre de sac à dos qui est sûrement assez lourd et une écharpe qui se défait souvent et qu'il tente de remettre d'un geste par-dessus son épaule. Les deux autres voyagent plus légèrement, avec des sacoches qui pendent à leur côté. Il est assez clair que 2 et 3 poursuivent 1.
Les trois personnages peuvent arriver soit de la droite de l'image après un plan un peu trop long sur le néant. Meilleure option : ils peuvent apparaître d'un bout d'horizon situé à peu près à droite et s'approcher de la caméra jusqu'à une distance d'environ 4 mètres, qui devrait également être la distance entre eux et le fossé. Toute la durée de leur approche se faisant au pas de course, et dans des conditions difficiles pour 1, la fatigue réelle des acteurs jouera un rôle important dans la suite des événements.

L'action en elle-même est très courte et dure un fraction du temps d'approche de 1, 2 et 3.
2 parvient à s'approcher suffisamment de 1 pour attraper une des sangles de son sac à dos au moment où ils atteignent la distance désirée avec la caméra. Très vite 3 le rejoint et attrape l'écharpe de 1 qui pend dans le vide, tous deux marquent en pause pour se camper sur leurs membres postérieurs et tirer sur ce qu'ils ont en main tandis que 1 tente de poursuivre sa course. 1 peut montrer de la résistance, et même utiliser ses mains, mais il finit par abandonner en laissant son sac partir en arrière. Comme il reprend sa course avec un peu plus de facilité, toujours dans la direction du fossé, 2 se débarrasse du sac en le jetant dans une direction non déterminée à l'avance. 3 lâche l'écharpe qui tombe très lentement au sol.

(De l'ensemble de la scène depuis que 2 a attrapé le sac de 1, devrait se dégager une impression de ridicule. Ce ridicule sera certainement fonction des vêtements portés par les personnages, de la fatigue qu'ils ont enduré en courant sur une si longue distance, de leur apparente absence de vigueur. Les quelques secondes suivantes dans le même ton.)

2 et 3 rattrapent 1 à quelques pas du fossé, tirant cette fois sur son manteau. 2 donne quelques coups médiocrement dirigés dans les membres postérieurs de 1. 1 glisse, tombe une première fois, semble prêt à se relever, mais tombe finalement la tête la première dans le fossé.

Cut sans subtilité. Changement de point de vue. La caméra est tenue à la main et plus que certainement par 3, puisqu'on ne le reverra plus. On voit directement 2 de dos, à quelque distance, qui saute dans le fossé où se trouve de l'eau, et où 1 rampe avec difficulté : peut-être s'est-il cassé quelque chose ? La fin va très vite : 1 s'est retourné pour se protéger des coups que semble lui donner 2, 2 pousse des deux mains la tête de 1 dans l'eau, qui y disparaît complètement en se débattant faiblement ; 3 s'est approché suffisamment pour qu'on voit les détails de cette opération. Tout en le maintenant sous l'eau, 2 sort son couteau d'on ne sait où, poignarde 1 dans un région du corps impossible à déterminer à cause de l'eau, qui est très boueuse. 2 maintient 1 sous l'eau tout en retirant l'arme. 1 cesse progressivement de bouger. Aucune parole n'a été échangée. À présent 3 est si proche qu'on ne voit que le corps de 1 et les mains de 2 qui sortent progressivment de l'eau pour disparaître du champ. Cut sans subtilité et fin possible avec écran noir, date et remerciements.

Plan optionnel : on voit d'assez près les pieds de 1 dans des bottes le tout dans l'eau qui pointent en direction du ciel. Un peu de courant autour de ces bottes.

(Note additionnelle : il est important qu'à aucun moment il ne soit clair que cette agression ait une quelconque motivation.)


En prime, un .gif particulièrement fainénant et approximatif. Non, je n'ai plus de papier, oui j'écris sur des serviettes.


samedi 16 novembre 2013

Temps jaune, temps bleu

Il fait bon se laisser aller dans un monde de mots et de carrefours abstraits. Veuillez m'excuser si c'est vague.

J'ai déjà dû vous le dire, je m'aventure dans le quatrième volet de l'ère du repos, dont j'ai choisi le titre: Temps Jaune, Temps Bleu. Il devient de plus en plus évident que cette histoire vague d'animaux et d'humains est une route aux multiples ramifications, dont l'une peut croiser celle d'un autre récit en cours d'écriture. 

Et le point précis de rencontre de ces deux histoires, de ces deux temps et deux espaces, peut s'appeler "conversation des poissons".  Mais rien n'est écrit. Oh, on pourrait parler des heures des histoires non-écrites, ça ne cuira pas la choucroute. 

En prime, veuillez trouver en fin d'article un gif paresseux. 



Je ne suis plus disponible à cette adresse.
Viens me trouver, viens me trouver, viens me trouver...
Je ne suis pas difficile à trouver
Je ne suis pas loin,
Mon cadavre indique ma position géographique (x et y)
Je ne suis pas difficile à traverser...
Tout me traverse,
Tout le pays me traverse,
Traverse moi.

Tu avais du mal à respirer, la peur t'étreignait.
Tu courais mais tes pauvres baskets ployaient sous le poids de ton corps et de ton sac, et tu ne savais pas comment rendre tes bras utiles.
Quand on te demandait la raison de ce regard perdu et de ce grondement sous ta poitrine, tu ne comprenais pas ni n'arrivais à te faire comprendre.
Malade, tu cherchais les autres, les deux autres.
On ne pouvait pas s'empêcher de penser aux lourdes carpes prisonnières de l'aquarium dans l'immense restaurant vide. Clairement pas des bêtes à manger, si sales et tristes. Les bêtes condamnées à la sédentarité. Nées ici ? Tu me demande, pensant que je pouvais répondre. Capturées où, et dans quel but ?
Et toi penché à tenter de communiquer avec les carpes. On ne pouvait pas penser à autre chose qu'à ce qui pouvait bien composer leurs rêves.

Et trop fatigué pour penser, je ne me suis pas inquiété pas de rentrer dans les couvs avec des pieds sales, dans ce lit où les deux autres dormaient déjà et s'en fichaient. Je les ai rejoint après le travail, je les ai rejoint après l'effort colossal qu'avait demandé ma journée pour rester debout, j'ai dit un faible bonsoir et laissé s'écouler la conscience de mes yeux.
Réveillé au milieu de la nuit parce que deux chats se battaient sur le toit, je n'ai pas pu me rendormir ; Les deux autres de part et d'autre et inconscients dans leur voyage intérieur (sans doute partagé) me firent douter de ce que j'avais entendu.
Endormi finalement quand la lune verte se couchait. Endormi entre les deux autres, la chaleur de l'autre directement à ma gauche comme celle d'un chat mystérieux ronronnant, tard le matin. Réveillé à nouveau par un faible mouvement : la course du soleil fait jouer la loupe de la fenêtre sur ton mollet enserrant les couvs, ton mollet chauffe tant que tu le dégage du rayon en roulant de vingt centimètres sur le côté, me poussant vers l'intérieur du lit où le troisième ne dort déjà presque plus.





lundi 4 novembre 2013

Histoire de deux chiens

J'ai une idée pour un nouveau livret de l'ère du repos, quatrième partie, qui pourrait s'appeler Temps Jaune, Temps Bleu. Il y aura une vague histoire de chiens, de chats et de meurtre. En prime, une illustration paresseuse.

La chaleur des câbles... Le vent souffle et fait grincer les fenêtres, mais pas ici, dans un autre temps et un autre espace. Le cerveau ne peut plus compter ni marcher, ne peut pas situer le reste de son corps, devenu objet flottant entre d'autres objets de nature très différente ; autrement que dans un filet de ressentiments et de pressentiments. La chaleur des ampoules est partout la même, la chaleur des chaises, la chaleur des arbres, et il y a cette histoire de chien dont je ne parviens pas à me souvenir.

Dans la pluie sont venus deux chiens sans noms, que par facilité on peut appeler Nord et Sud, ou A et B ; ils mangeaient des plantes et la viande morte trouvée par terre, ou donnée par des passants. Ils ne savaient pas tuer, et d'ailleurs il n'y avait rien à tuer, ou si peu. Les animaux sont bien trop durs à attraper et à mettre à mort, ils se défendent, ils tiennent à la vie ; pour les y arracher il faut très bien les connaître, et les chiens les fréquentaient sans les connaître vraiment. Il y a une histoire avec ces deux chiens qui venaient toujours ensemble comme une seule chose double, qui sont morts maintenant, mais je ne me souviens pas de ce qui leur est arrivé ni de pourquoi leur histoire a une quelconque importance. Leur monde, c'était les animaux, les arbres, le boucher, les passants, le soleil derrière leurs paupières closes, la nuit et les étoiles, les ampoules électriques et les ivrognes, les arbres et les vélos, les chaises et les portes, les cours intérieures et la pluie.

Ils ne connaissaient que la nuit. Ils se battaient souvent, ensemble ou avec les gens, avec le boucher, avec les passants. Je les ai vu courir après des gens dans le soir, des gens portant des écharpes terriblement longues, qui pendaient... Je ne sais pas si ils voulaient jouer, ou tuer ; si ils voulaient réclamer de la viande ou des fruits.